Georges Mathieu

Georges Mathieu (1921–2012) est l’une des figures majeures de l’abstraction lyrique et l’un des pionniers de la peinture gestuelle en France. Porté par une volonté d’émancipation radicale vis-à-vis des conventions, il fait du geste — immédiat, fulgurant, irrépressible — le cœur d’un langage pictural entièrement affranchi de la représentation.
Né à Boulogne-sur-Mer, Mathieu commence à peindre en 1942. Une lecture déterminante d’un essai sur Joseph Conrad, deux ans plus tard, le convainc d’abandonner la figuration pour rechercher un style “pur”, capable d’exprimer des forces intérieures plutôt que d’imiter le réel. À partir de 1947, installé à Paris, il rejoint Wols, Hartung ou Atlan dans une révolte contre l’académisme et contre l’abstraction géométrique qui domine alors.
Pour Mathieu, peindre revient à se connecter à un champ d’énergies, dans un état où la pensée rationnelle s’efface au profit d’une intuition quasi médiumnique. Cette dimension spirituelle et intuitive, que certains rapprochent de la calligraphie orientale, devient particulièrement visible lors de son triomphal séjour au Japon en 1957, même si lui-même rejetait une assimilation trop littérale.
Précurseur de la performance picturale, il réalise dès 1956 de vastes compositions en public, souvent en un temps limité, transformant l’acte de peindre en événement. Des œuvres comme La Bataille de Bouvines ou L’Abstraction prophétique témoignent de cette volonté de donner forme, par l’urgence du geste, à ce qu’il nommait des “drames de la lumière”.
Artiste total, Mathieu étend son vocabulaire au-delà de la toile : sculptures, céramiques, pièces de mobilier, bijoux, tapisseries des Gobelins… Autant de territoires qui prolongent son exploration d'une expression libérée du rationalisme hérité des Lumières, fondée sur la spontanéité et la tension intérieure.
Son œuvre est aujourd’hui conservée dans les plus grandes institutions internationales, dont le Centre Pompidou (Paris), le MoMA (New York) ou le MOMAT (Tokyo).
