Gianni Bertini

Scène d’atelier - l’artiste Gianni Bertini, signature gestuelle sur un mur — son univers et de son langage visuel.

Peindre comme on invente : un modernisme des signes et des surfaces 

Figure singulière de la scène artistique européenne de l’après-guerre, Gianni Bertini (1922–2010) développe dès les années 1950 une œuvre où la peinture devient un véritable laboratoire de signes, de matières et d’empreintes. Né à Pise et actif entre l’Italie et la France, il appartient à cette génération qui cherche à dépasser les frontières établies entre abstraction, figuration et langage visuel.

Ce qui distingue Bertini n’est ni une école ni un dogme, mais une méthode : observer la circulation des images dans la société moderne, puis en restituer la pulsation sur la toile. Très tôt, il expérimente des procédés mixtes : collages, pochoirs, structures modulaires, qui lui permettent de composer un vocabulaire personnel, oscillant entre rigueur géométrique, spontanéité gestuelle et fragments du réel. 

Dans les années 1950, alors que l’Europe reconstruit son identité visuelle, Bertini élabore des compositions à la fois sobres, tendues et profondément contemporaines, où l’économie de moyens renforce la densité expressive. Dans ces œuvres, souvent proches d’un post-cubisme réinterprété, la peinture se déploie comme une architecture de plans et de signes. Cette période, rare sur le marché, dialogue directement avec les recherches menées en France autour de la synthèse formelle, de Fernand Léger à l’École de Paris tardive. 

À partir des années 1960, Bertini s’aventure vers des formes plus libres, intégrant la photographie, la typographie, parfois même des stratégies d’appropriation visuelle avant l’heure. Son travail anticipe nombre de problématiques qui deviendront centrales dans l’art conceptuel et l’art d’image. 

Aujourd’hui, l’œuvre de Gianni Bertini apparaît comme celle d’un passeur : entre l’abstraction et la vie moderne, entre la peinture et les signes qui structurent notre regard. Une œuvre qui, loin des écoles constituées, affirme une vision indépendante et résolument actuelle.